Ce préalable étant posé, les événements ont des conséquences inévitables sur notre profession.
Depuis la rentrée des vacances d'octobre, dans mon école comme dans d'autres, nous pratiquons la semaine des 5 jeudis: ces 3 dernières semaines, nous n'avons travaillé que 6 jours, et encore, avec de très nombreux absents. Les multiples barrages empêchent les profs de rejoindre leur établissement, mais il y a plus grave.
Annette Lafond est une (très professionnelle) journaliste de Mayotte (Malango Actualités). Elle a recueilli des témoignages d'enseignants ( profs du secondaire, mais c'est pareil pour le premier degré) et vous allez comprendre le titre de ce message. Précision: caillasser signifie souvent pris sous un jet de pierres, même si on n'est pas directement visé.
"25 professeurs ont choisi de rompre leur contrat immédiatement selon le syndicat du second degré SNES. Certains lycées et collèges manquent de professeurs, et si pour l’instant les absences sont imputables aux problèmes de circulation provoqués par les barrages, l’arrêt du conflit va mettre les établissements dans l’impossibilité d’assurer certains cours… Et ceci, sans compter les enseignants qui ne souhaitent pas renouveler leur contrat au bout d’un an ou de trois ans.
Les départs immédiats sont justifiés par des agressions, 18 professeurs ayant bénéficié de 7 à 15 jours d’Incapacité de travail (ITT), victimes de caillassage ou d’agressions directes.
La période des mutations arrive et habituellement c’est une cinquantaine de mails de renseignements qui arrive sur la boite du SNES. « Cette année, il n’y en a que 3 ou 4… Il va y avoir un gros problème de recrutement » explique Yann Durozad, secrétaire général du SNES.
Nous avons pu recueillir plusieurs témoignages de violences, et si certains n’ont été « que » rançonnés comme cela peut arriver sur un barrage, d’autres ont été gravement blessés : tel ce professeur de mathématiques agressé par des jets de pierre réitérés alors qu’il rentrait du collège de Kawéni le mercredi 26, sur le rond-point du Jumbo score par les émeutiers, 7 jours d’ITT ou ce professeur d'anglais au lycée de Mamoudzou caillassé à son retour au domicile le mercredi 26 octobre à 11h 30 au rond point de Jumbo score, et ce professeur au collège de Chiconi, caillassé toujours le même mercredi 26 à un barrage pourtant levé à Vahibé, ainsi que ce professeur de lettres au collège de Dembéni agressé mercredi 26 devant chez lui à Tsoundzou, ou encore ce professeur de mathématiques du lycée du Nord molesté à un barrage vendredi 21 en revenant chez lui vers 22h00 dans l’extrême nord avec des dégâts sur la voiture, ainsi que ce professeur d’éco gestion au lycée de Mamoudzou, caillassé violemment en rentrant chez lui ; il venait de Tsoundzou le soir peu avant minuit le vendredi 21. Il a porté plainte. Il y a aussi un enseignant contractuel au collège de Passamaïnty, agressé sur son deux roues à la sortie de Dembéni lundi 24 sur la route vers 17h00 en repartant du collège par 8 individus d’une vingtaine d’années et ce professeur d’Histoire-Géographie au collège de Kawéni 2, caillassé à Majicavo /Koungou en revenant chez lui après sa journée de cours mercredi 26, ainsi que 4 autres enseignants caillassés en sortant du collège de Kawéni mercredi, l’un d’entre eux, caillassé même en cours avec ses élèves et une vingtaine de collègues obligés de se réfugier au Lycée de Sada le 19 octobre jusqu’en milieu de soirée par des émeutiers…
Sans compter les angoisses « collatérales », les peurs de laisser leurs enfants à la maison, ou de les envoyer à l'école quand on ne peut pas les accompagner..."
Nous en sommes au 38ème jour de grève et malgré l'arrivée d'un second médiateur-négociateur, l'issue n'est pas en vue et les barrages ont réapparu, jusqu'à lundi prochain minimum. La lassitude gagne, la crainte des conséquences est évoquée par tout le monde mais Mayotte s'enfonce inexorablement et l'après sera très très dur. Sans compter les angoisses « collatérales », les peurs de laisser leurs enfants à la maison, ou de les envoyer à l'école quand on ne peut pas les accompagner..."
Mais les politiques l'entendent-ils? Et les leaders syndicaux, que la politique intéresse décidément beaucoup aussi, sauront-ils terminer la grève?
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